Lorraine connection - Dominique Manotti
Auteur : François
La principale activité de l'usine Daewoo de Pondange en Lorraine est la fabrication de tubes cathodiques. Un gros contrat passé avec Thomson Multimédia, et des subventions européennes, destinées à pérenniser les emplois locaux dans cet ancien bassin de la sidérurgie, ont conduit le groupe coréen à développer cette activité en 1995. Les conditions d'hygiène et de sécurité y sont déplorables. Sur une chaîne d'assemblage un arc électrique envoie à terre une ouvrière, Emilienne, enceinte de 6 mois. Elle gît inanimée. Aussitôt c'est la panique. Le samu est alerté. Le contremaître du secteur intervient. Rapidement il demande aux filles de reprendre le travail. Face à ce manque d'humanité, Rolande lui balance une jolie claque à la figure. Intervention du jeune DRH, arrogant, inexpérimenté. C'est le renvoi immédiat. En parallèle de cet incident, la fuite se propage au sein de l'usine : les primes négociées avec la direction ne seront pas versées. Il n'en faut pas plus pour mettre le feu aux poudres. La grève est instantanément votée. Les cadres bientôt pris en otage.
Mais l'usine de Pondange se situe aux frontières d'une restructuration industrielle qui la dépasse. En effet le gouvernement français a décidé de vendre Thomson. Deux candidats sont sur les listes : Matra, associé à Daewoo, et Alcatel. Matra semble avoir une longueur d'avance dans cette compétition acharnée. Certains, en Lorraine même, s'imaginent confortablement assis aux manettes du future géant industriel. Le conflit à Pondange risque de maculer le tableau. Si la mariée n'est plus présentable, leur avenir en pâtira. L'affrontement quitte alors la moquette profonde des sphères dirigeantes, pour se déplacer sur le terrain où violences, manipulations et tricheries trouveront des issues sanglantes.
Dominique Manotti plonge ses lecteurs dans une affaire romancée remarquablement bien documentée. Sa vision des dessous de tables d'une restructuration tant industrielle que politico-financière est détonante. Le rythme qu'elle procure à l'histoire lui procure une fluidité et une percussion magistrale. A commencer par l'avertissement donné en préambule : « Ceci est un roman. Tout est vérité, tout est mensonge ».